Les cafards ont remué des antennes à l’écoute de cette rubrique de France Inter lundi matin 20 septembre
A la recherche d’acousmates
Dans les sous sol de la ville, un homme inspecte une gouttière à l'aide d'un étrange appareil.
Il prétend entendre des résurgences sonores fossiles...
Zêtes comme nous hein ! A part les acouphènes dont vous avez entendu vaguement parler, vous ne savez pas du tout ce que sont les acousmates. Eh bien, on va tenter d’éclairer votre lanterne et de déboucher vos tympans pollués par tous les bruits du quotidien
Ecouter les sons du passé, une utopie scientifique ?
Est-il possible de détecter les résurgences acoustiques fossiles dont sont imprégnées nos villes, la végétation, et même nos objets familiers ? Entendre "pour de vrai" la voix de votre arrière grand-mère, la faune de votre quartier à l'ère quaternaire, le chant de l'homme de Neandertal ?
De même qu’il y a une préhistoire de l’Humanité, une civilisation précolombienne, des philosophes présocratiques, il y aurait une mémoire sonore « préphonographique », enfouie dans la terre, dans nos vestiges… ou dans notre imaginaire. Comment sonnait la langue de nos ancêtres ? Ce qui semblait hier un aimable canular est aujourd’hui l’objet de spéculations scientifiques émanant de prix Nobel dont les hypothèses nous laissent – littéralement – rêveurs. Rêvons, donc.
Sans doute ne suffira-t-il pas, comme le proposait Rabelais avec humour, de « dégeler » des paroles ou des sons pris dans les glaces. Or, les expériences récentes sur de l’eau exposée à différentes musiques et cristallisée par le froid du Dr Masaru Emoto ne peuvent laisser indifférent ; de même que l’audition vertigineuse des (véritables) résonances fossiles du « Big bang » (A. Penzias & R. Wilson, Nobel 1964). Sans oublier les extravagantes affirmations d’un savant comme Georges Charpak (encore un Nobel), qui voit en toute poterie antique un phonogramme potentiel, guère plus improbable à faire entendre demain qu’un rouleau d’Edison aujourd’hui.
Les voix de Cléopâtre ou d’Aristote nous parviendront-elles un jour d’un vase, comme s’ils parlaient à la radio ? Nous pourrons peut-être un jour les entendre, grâce à une science nouvelle, encore balbutiante mais aux perspectives fabuleuses : la paléophonie.
Marcel Baudot, un acousmate visionnaire
Marcel Baudot, pionnier et fondateur le l’O.R.E.I., aux commandes de son premier détecteur, grâce auquel il espérait partager ses perceptions inouïes.
Né à la fin du 19ème siècle, ce modeste instituteur et bricoleur de génie est l’inventeur de la paléophonie et le fondateur, dans les années 1930, de l'O.R.E.I.
Marcel Baudot (1891-1957), s’aperçoit à l’âge de 8 ans qu’il est acousmate, c’est-à-dire qu’il entend des voix humaines et des sons d’instruments dont il n’arrive pas à identifier l’origine. Fasciné par ces sons inexplicables, il a une intuition qui va bouleverser sa vie : il ne peut s’agir que de résurgences acoustiques fossiles ! C’est la naissance d’une nouvelle science : la paléophonie.
Marcel Baudot, alors simple instituteur passionné de bricolages radio-électriques, tente de capter, de fixer, d’identifier mais aussi de partager ses perceptions acousmatiques. La rencontre décisive en 1911 avec un certain Wilhelm Apollinaris de Wąż-Kostrowitcky le convainc d’y consacrer sa vie.
La première guerre mondiale met d’abord un arrêt à ses recherches, et il est affecté aux transmissions. Mais les services secrets de l’Armée française s’intéressent rapidement à ses travaux et lui offrent un laboratoire qui deviendra, à la sortie du conflit, l’Organisation des Recherches sur les Environnements Invisibles.
Dans la continuité de son fondateur, l’O.R.E.I. est aujourd’hui un laboratoire indépendant de renommée internationale dont les travaux portent sur l’ensemble des manifestations acoustiques de notre environnement, et notamment sur la présence de sons conservés par les matériaux.
Fidèles héritiers de Marcel Baudot, les chercheurs de l’O.R.E.I. continuent, au sein de leurs laboratoires, à expérimenter les techniques initiées par leur prédécesseur et à en inventer de nouvelles, comme la photophonie, la phonolecture directe par frottis, ou encore l'aquaphonie qui permettent en effet aujourd'hui de ré-entendre des fragments de sons, datant de plusieurs dizaines, voire centaines d'années.
Ils interviennent, comme les archéologues, sur les chantiers (rénovation, construction, démolition, assainissement…) susceptibles d’anéantir à tout jamais de précieuses traces de notre mémoire sonore.
Peu maniable ? ah bon ?
Voilà ! Ca c'est du portatif !
- Et le premier qui ricane, je lui fous mon pied au cul !
Manquerait plus qu’on se foute de la gueules des scientifiques, surtout quand ils sont affublés de cette manière !
Plus de renseignements sur le site de L’OREI : http://www.orei.fr/